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Mother

Section Test.


Mother
27/07/1989
Edité par Nintendo
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Sortie US non communiquée
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Sortie EURO non communiquée
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Console: Nintendo Nes
Genre:Jeu de Rôle
Développeur: Ape Studios
Joueurs: Solo uniquement
Une exclusivité Nintendo Nes
Vidéo(s) commentée(s): 1
Photo de la boite de Mother
Mother, capture d'écran Mother, capture d'écran Mother, capture d'écran
Mother est une trilogie de jeux de rôle japonais créée par Shigesato Itoi du studio de développement Ape, trilogie extrêmement peu connue dans nos contrées européennes. Seul le deuxième volet, rebaptisé Earthbound pour l’occasion, et sorti aux États-Unis sur Super Nes en 1995 fit parler un peu de lui, du fait d’une exceptionnelle campagne marketing menée par Nintendo pour imposer une nouvelle licence en occident. Les ventes moyennes du jeu relativisèrent les espoirs et Earthbound ne parvint jamais aux portes de l’Europe. Le troisième volet, Mother 3, est quant à lui sorti en 2006 sur GameBoy Advance, uniquement au Japon.

Mother premier du nom (ou Earthbound Zero comme il fut nommé par des fans l’ayant traduit en anglais) est sorti en 1989 seulement au Japon, et fait un peu office de parent oublié de cette trilogie. Le second marqua les esprits par son background en béton, ses musiques sublimes, un univers riche en couleurs et une approche très originale du RPG par les développeurs japonais, tandis que le troisième demeure également dans le cœur de nombreux fans pour être l’épisode le plus abouti émotionnellement, tout aussi décalé mais plus dramatique que ses prédécesseurs. Plus d’un joueur sentit son cœur battre confronté aux scènes clés du jeu.

Nous allons voir que Mother premier du nom mérite amplement sa place parmi ses rejetons.


Il était une fois en Amérique…

L’écran titre vous met immédiatement dans le bain : vous choisissez le nom de chaque personnage jouable, et répondez à des questions curieuses qui mettent déjà en avant l’humour très ironique du jeu. S’ensuit une histoire concernant un couple de jeune mariés, disparus à la suite de mystérieux événements dans une contrée américaine au début du XXème siècle. Le mari réapparut un jour, mais jamais sa femme ne revint, ce dernier ne raconta jamais ce qu’il avait vu…

Autant vous dire que ces simples mots écrits sur fond noir nous mettent tout de suite dans le bain, sans l’aide de la moindre cinématique ou d’images illustrant les propos. Vous vous trouvez ensuite aux commandes d’un jeune gamin, le héros principal, vous n’avez pas fait un pas qu’il se trouve agressé par sa peluche ! Une minute plus tard, vous devez défendre votre sœur contre sa lampe de chevet ! Voilà, le ton est déjà donné, attendez-vous à bien d’autres surprises loufoques tout le long du jeu.

Suite à ces événements, votre père vous téléphone et vous met en charge de résoudre ce qui se passe dans le coin. Vous quittez ainsi le domicile familial pour partir à l’aventure. Sans vous en dire davantage, sachez que le scénario se révèle très sérieux dans le fond malgré le ton décalé de l’aventure. C’est la marque de fabrique de la série Mother, celle qui fit son succès auprès des joueurs.

L’ambiance est déjà originale en soi avec une flopée d’ennemis déjantés à combattre et des objectifs loufoques à remplir. Attendez-vous à affronter des hippies malveillants, des semi-remorques fous lâchés en pleine nature, ou encore des zombies à la dégaine de gangsters des années 30 ! La deuxième originalité vient du fait que vous évoluez dans un monde réaliste. La carte dispose de décors variés : plaines, montagnes, forêts etc. Plusieurs villes sont en outre disposées, avec leur banlieue résidentielle, leurs immeubles et tous les services proposés. Les dialogues suivent le ton ironique de votre épopée, comme par exemple lorsque vous devez aller chercher le concierge de l’école pour accéder au toit, et que celui-ci vous raconte sa vie conjugale : à vous de l’amadouer par rapport à sa femme pour le convaincre de vous aider.

Ainsi le jeu dispose d’une ambiance et d’un caractère bien trempé totalement singulier et bien mis en avant, chose très rare dans l’univers vidéo-ludique. Le système de jeu va-t-il suivre alors ?

Classique, maîtrisé, avec sa touche personnelle

Vous êtes dans un jeu de rôle à la Dragon Quest, c’est-à-dire que les affrontements se déroulent en vue subjective. Vous ne voyez pas votre personnage, uniquement le ou les ennemis sur un écran noir. Les animations sont sommaires, mais les bruitages et la musique savent donner vie à de simples pixels fixes et finalement les combats sont très dynamiques. Ils se déroulent au tour par tour, la vitesse de votre personnage ou de l’ennemi déterminant qui agira en premier. Vous pouvez attaquer directement à mains nues, ou muni d’un objet acheté préalablement au supermarché du coin. Ces armes sont toutes des accessoires de la vie commune, et chacune -hormis de rares exceptions- ne peut être attribuée qu’à un seul personnage. Le héros principal, par exemple, utilise sa batte de baseball contre ses adversaires. Vous disposez également de pouvoirs PSY, du moins pour certains protagonistes. En effet, tous les personnages jouables ne disposent pas de ce don, et certains le développent davantage que d’autres parmi les élus. Vous pouvez vous soigner avec, attaquer l’ennemi via différents pouvoirs (gel, foudre, rayon) ou lui infliger des statuts handicapants comme la paralysie ou l’hypnose. Ces dons sont les plus basiques, et d’autres plus originaux et plus vicieux apparaitront. Vous les gagnerez au fil de votre expérience acquise lors des affrontements. Vous pouvez également fuir en cas de mauvaise tournure du combat : ça ne marche pas à tous les coups, mais chacun de vos personnages peut le tenter une fois durant son tour d’action. Vous avez aussi la possibilité de parer les coups, d’user d’objets aux effets variés bien que demeurant assez classiques : empoisonnement, paralysie, dégâts importants. L’originalité de ces derniers provient de la mise en scène de leur utilisation. En effet, vous devez user d’une corde pour paralyser votre ennemi, il sera ligoté. Vous pouvez aussi faire fuir les ennemis les plus faibles avec un haut-parleur.

Le système d’évolution des différents protagonistes que vous incarnerez est quant à lui très classique, à savoir que votre force, votre vitesse etc. augmentent quand vous augmentez de niveau. Chaque ennemi vous attribue des points une fois vaincu. Passé un certain seuil, vous accédez au niveau supérieur.

Vous l’aurez compris, le système de jeu de Mother ne transcende pas le genre, mais il parvient à être très dynamique malgré les restrictions de la console et le design épuré des combats ; sans oublier le ton décalé, omniprésent. Il arrive que les ennemis humains profèrent des menaces, comme d’appeler vos parents, ce qui fait baisser considérablement votre combativité et la puissance de vos coups. J’ai pour ma part une appréciation toute particulière pour les propos du hippie (que je vous laisse découvrir) qui mettent vos héros dans une rage folle et augmentent au final leur puissance. Même les ennemis ne disposant pas de la parole ont leur lot de comportement atypiques. Ce n’est qu’une description qui apparait sur fond noir, ne vous attendez pas à une animation de folie ; mais parvenir à procurer une telle sensation d’immersion avec si peu, j’appelle ça simplement du talent.

Vous êtes également actif sur la carte du monde. Outre les énigmes à résoudre propres au genre, vous disposez de la fonction « check » ou « vérifier » en français, qui vous permet d’analyser une personne, une armoire, un cadeau. Ceci vous permet de trouver des objets ou de déceler une action à effectuer. Votre pouvoir PSY est également utile grâce à sa fonction télépathie, qui permet de lire dans les pensées de certains PNJ ou de se soigner hors combat.

Débrouille-toi, gamin

Le jeu est très difficile. Attendez-vous à enchaîner les combats encore aléatoires à cette époque pour faire du levelling. Les ennemis de la prochaine zone à visiter ne font pas de cadeaux, et vous pouvez voir vos points de vie filer comme neige au soleil. Le début de l’aventure est un calvaire en soi. Votre force de frappe est ridicule, alors que vous n’avez pas encore assez d’argent pour une arme et des objets de soin, vous faisant enchainer les game over dans un premier temps. En outre, le jeu ne vous prend par la main à aucun instant si ce n’est par les indications des PNJ, et vous allez galérer un bon moment afin de comprendre certaines subtilités du jeu.

Sachez tout d'abord que vous ne pouvez porter que dix objets par personnage, le reste étant confié à votre sœur qui dispose d’un stock illimité, ou bien purement jeté si l'item en question n’est pas indispensable pour progresser. L’argent se gère aussi d’une manière différente d’un jeu de rôle classique. Ainsi, chaque combat vous fait gagner des dollars entreposés à la banque. Vous pouvez les retirer avec votre carte de crédit aux distributeurs des centres commerciaux. Ce souci du détail intègre parfaitement cet univers parodique de la société nord-américaine. Le téléphone est quant à lui un objet crucial, vous permettant de sauvegarder, de voir l’argent que vous avez gagné, le nombres de points d’expérience requis pour atteindre le prochain niveau et enfin de vous reposer gratuitement.

Les soins pourront également vous être administrés à l’hôtel ou à l’hôpital, ce dernier lieu vous permettant de profiter de fonctions particulières associées aux médecins, comme de soigner chaque membre indépendamment ou de vous guérir d’une altération d’état spécifique. Si l’un de vos personnage meurt au combat, son esprit continue à vous suivre mais il ne pourra plus vous aider contre les ennemis. Pour le récupérer, vous devrez vous adresser à la réceptionniste de l’hôpital qui vous demandera qui vous cherchez, et vous dira que tel membre a été retrouvé avec des graves blessures. Payez ses soins, et il sera à nouveau sur pieds. Ce souci du réalisme témoigne de la volonté des développeurs de se rapprocher d’un environnement réel perturbé par des phénomènes étranges. Ce genre de détail renforce le cachet du jeu et son atmosphère.

Si les écrans de combat sont très sobres pour ne pas dire minimalistes, la carte du monde où vous pérégrinez est pour sa part colorée, accompagnée de musiques dans le ton de l’environnement, de PNJ décontenancés par les mystérieux événements mais toujours drôles dans leurs propos. L’animation des personnages est assez rigolote et plutôt réussie, on regrettera peut-être une certaine absence de détails au niveau des décors. Pour la justifier, je mettrai en avant les limitations techniques de la console. Ensuite on peut toujours faire mieux, comme le prouve Gremlins 2. Mais bon, il est sorti deux ans plus tard et sachez que Mother exploite honorablement les capacités de la NES.

Les musiques des combats sont variées, il y a le thème de base pour l’ennemi lambda, le thème plus oppressant pour les ennemis costauds et la musique se déchaîne contre les adversaires les plus incongrus. Elles sont toutes très réussites, servies par des bruitages sympathiques.

Strange, Funny and Heartrending

Que dire de plus si ce n’est que Mother est mon coup de cœur du moment ? Un jeu dont je n’avais jamais entendu parler étant jeune, et que j'ai découvert il y a tout juste deux ans. Il est difficile de se remettre aux titres rétros quand on a pris l’habitude des jeux actuels avec des checkpoints tous les cent mètres, des game over pas du tout pénalisants et un assistanat outrancier. C’est d’autant plus dur s’il ne s’agit pas d’un jeu ayant bercé notre enfance, cela devient une entreprise folle si le soft exige autant de patience, de temps et d’immersion pour ces pauvres pixels colorés depuis longtemps dépassés par de formidables cinématiques en HD pour mettre en avant une histoire et une atmosphère. C’est cela qui fait la force de Mother, tous les sentiments qu’il procure par la seule volonté des développeurs de nous offrir une expérience unique avec les moyens du bord.

Si le japonais vous répugne, tout comme moi, il existe des roms traduites en anglais et il y a même un patch de traduction française. Mother est à ce jour le seul épisode de la série intégralement traduit dans notre langue. Hormis quelques petits bugs lors des certains dialogues, le tout est très bien réussi.

En définitive, Mother n’est pas seulement un jeu de rôle atypique, c’est un chef-d’œuvre au même titre que ses successeurs. Entaché de quelques tares bien ringardes tels que les combats aléatoires et le levelling, Mother s’en sort admirablement grâce à son atmosphère unique, son histoire touchante et sa satire ironique de la société de consommation contemporaine. Si le RPG japonais vous a toujours dégouté par son dynamisme exubérant, ses scénarios nunuches et son univers psychédélique, c’est le moment de vous réconcilier avec le genre. Les développeurs d’Extrême-Orient savent eux aussi faire preuve de finesse et de sobriété pour un résultat fort en émotions.


Article publié le 28/10/2011 Jeu testé par AndréFontaine