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Lure of the Temptress

Section Test.


Sortie JAP non communiquée
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Lure of the Temptress
??/??/1992
Edité par Virgin Games
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Lure of the Temptress
??/??/1992
Edité par Virgin Games
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Console: PC
Genre:Aventure
Développeur: Revolution Software
Joueurs: Solo uniquement
Existe aussi sur: Apple Macintosh- Atari ST- Commodore Amiga-

Photo de la boite de Lure of the Temptress
Lure of the Temptress, capture d'écran Lure of the Temptress, capture d'écran Lure of the Temptress, capture d'écran
Étrangement, l'association entre point & click et heroic fantasy n'a été utilisée que parcimonieusement par les développeurs de jeux vidéo ces vingt dernières années. Il existe pourtant quelques perles réunissant avec brio ces deux univers, à commencer par le titre qui nous intéresse aujourd'hui. Lure of the Temptress, commercialisé en 1992, fut le premier jeu d'un petit studio de développement britannique baptisé Revolution Software, studio qui connaîtra la consécration dans le milieu des années 90 avec la saga Broken Sword, plus connue dans nos contrées sous le patronyme « Les Chevaliers de Baphomet ». C'est pourtant avec des softs comme Lure of the Temptress ou Beneath a Steel Sky sorti deux ans plus tard, que la firme put acquérir suffisamment d'expérience dans le domaine du jeu d'aventure pour concurrencer la référence Lucas Arts sur son propre terrain. Retour sur les débuts d'un développeur culte...

Quand un pécore se découvre une âme de héros...

Comme mentionné en introduction, LOTT prend place dans un contexte médiéval. Après des décennies de guerre, le Roi est enfin parvenu à instaurer une paix durable au sein de son royaume, gommant les querelles entre ses sujets et faisant prospérer l'agriculture. Un beau jour, le souverain se rendit, suivi de sa cour, dans un village pour disputer une partie de chasse dans les environs, offrant à un jeune paysan du nom de Diermot de gagner quelques pièces d'or en œuvrant comme rabatteur. Hélas, cette apparente tranquillité allait bientôt prendre fin avec l'arrivée d'un messager, informant le roi d'une révolte menée par une enchanteresse du nom de Séléna, dans le lointain village de Turnvale. Prudent, Diermot prit le parti de s'éclipser discrètement afin d'éviter de courir au devant des ennuis. Le destin allait en décider autrement, puisque sa monture décida de son propre chef de suivre le souverain et sa garde, chevauchant jusqu'à Turnvale. Il s'avéra qu'il s'agissait d'un piège, et que Séléna avait levé une armée de créatures inhumaines : les Skorls. Tombé dans une embuscade, le contingent fut décimé et le roi tué, ne laissant que quelques survivants. Diermot, quant à lui, fut désarçonné dès le début de la bataille et perdit connaissance suite à sa chute. Il ne se réveilla que quelques heures plus tard, dans une cellule perdue au fin fond du donjon de Turnvale. Vous l'aurez compris, c'est ce parfait anti-héros que vous serez amené à incarner. Le but de l'aventure consistera dans un premier temps à vous évader de votre cellule, mais évoluera bien vite pour vous faire assumer un rôle actif dans la chute de Séléna. L'occasion de vous apercevoir qu'un Mal bien plus grand est à l’œuvre, et que l'ensorceleuse n'est finalement que le simple pantin d'un démon ancestral.

Le scénario de Lure of the Temptress, distillé au travers de quelques séquences textuelles entrecoupées de cinématiques et dialogues, s'avère d'une qualité largement suffisante pour garder le joueur en haleine jusqu'au terme de son aventure. Rappelons que nous sommes face à un jeu commercialisé dans le début des années 90, époque à laquelle il jouissait d'une scénarisation clairement supérieure à la majorité de ses concurrents.

Le Virtual Theatre, une évolution majeure des nineties

Mais là ne se situe pas la seule force du soft de Revolution Software par rapport aux autres titres de cette période. Dans les années 90, Lucas Arts exerçait une domination quasi-totale dans le monde du jeu d'aventure, tant et si bien que rares étaient les firmes à oser venir concurrencer ce géant sur son propre terrain. Depuis Maniac Mansion, tous les point & click Lucas s'appuyaient sur le génial moteur SCUMM (Script Creation Utility for Maniac Mansion), se basant sur un certain nombre de verbes affichés en bas de l'écran, et permettant différentes interactions avec les éléments affichés à l'écran en constituant des phrases. Il s'agissait là d'une évolution plus ergonomique du système utilisé dans les jeux d'aventure textuels (et de leurs premiers équivalents graphiques comme King's Quest de chez Sierra), où il était demandé au joueur de taper en toutes lettres au clavier les actions à effectuer.

Le premier défi de Revolution Software consistait donc à concevoir un moteur capable de rivaliser avec le SCUMM. Ainsi fut créé par Charles Cecil et Tony Warriner, le Virtual Theatre. Bien qu'assez proche de son concurrent dans son principe, il comptait quelques innovations des plus intéressantes qui lui permirent de s'imposer comme une évolution importante de son époque dans le domaine du jeu vidéo. Sa plus grosse spécificité était d'offrir une certaine forme d'autonomie aux différents personnages. Au contraire de la plupart des titres alors en circulation, les PNJ de LOTT ne restaient pas statiques en attendant que le joueur déclenche une interaction, mais étaient libres de se déplacer dans les différents environnements, de vaquer à leurs occupations, et même de discuter entre eux. L'immersion n'en était que plus grande, et plongeait le joueur dans un monde beaucoup plus vivant, tant et si bien qu'il n'était pas rare de s'arrêter quelques secondes pour « écouter » une discussion intéressante, mettant en évidence des personnalités très variées pour les différents interlocuteurs. De même, pourquoi se priver de jeter un œil par une fenêtre pour connaître l'opinion d'un PNJ à votre égard ? La seconde innovation, directement en relation avec la première, consistait à donner une véritable consistance solide aux sprites. Ainsi deux protagonistes ne pouvaient-ils désormais plus passer l'un à travers l'autre, et devaient-ils se contourner, le plus souvent en se fendant d'une réplique consistant la plupart du temps en quelques mots d'excuses (ou d'insultes). De nos jours, ces deux innovations peuvent paraître désuètes, mais il en allait tout autrement en 1992, et le Virtual Theatre fut alors considéré à juste titre comme une évolution vidéoludique majeure.

Hélas, dans les faits, le moteur se heurte à quelques problèmes rédhibitoires dus à sa jeunesse. Tout d'abord, il ne sera pas rare que vous deviez passer un temps considérable à parcourir les différents tableaux afin de trouver le personnage dont vous avez besoin, celui-ci pouvant se trouver n'importe où dans la zone de jeu. Second problème, beaucoup plus grave quant à lui, le pathfinding devient extrêmement frustrant au bout de quelques heures de jeu. Imaginez vous un simple écran, dans lequel se retrouvent simultanément cinq ou six sprites. Dans ces conditions, réussir à quitter les lieux ou pire, à discuter avec l'un des acteurs présents, s'apparentera à un véritable cauchemar, les collisions se multipliant. De même, Diermot opérera parfois des choix plutôt curieux quant à ses itinéraires, prenant par exemple le parti de faire trois fois le tour de l'écran pour enfin réussir à se trouver face à son interlocuteur, condition sine qua non pour engager la conversation. Bref, un moteur révolutionnaire, mais dont les imperfections donnent naissance à des parties souvent laborieuses. A noter que le Virtual Theatre sera réutilisé deux ans plus tard dans Beneath a Steel Sky, les développeurs étant parvenus pour l'occasion à atténuer ses défauts sans pour autant les faire disparaître totalement...

Gameplay classique, mais subtilités au rendez-vous!

Pour le reste du gameplay, nous sommes face à un point & click classique utilisant, à l'instar des productions Lucas Arts, un système de verbes pour déclencher des interactions avec les éléments présents à l'écran. La différence réside dans l'interface, puisque la zone de jeu s'avère beaucoup plus dépouillée dans le bébé de Revolution Software. Seul le pointeur est affiché à l'écran, et il appartient au joueur de l'utiliser pour se déplacer en cliquant gauche sur un endroit précis, d'observer les éléments interactifs (toujours via le clic gauche), ou d'interagir avec ces derniers par le truchement du clic droit. S'affiche alors la liste d'actions disponibles, sous la forme de verbes (donner, prendre, parler...), liste variant en fonction de l'objet et des interactions qu'il offre. A vous de constituer des phrases correspondant à l'action que vous souhaitez réaliser, celles-ci s'affichant en haut de l'écran au fur et à mesure de leur complétion. Le dépouillement de l'interface est d'autant plus évident du fait de l'absence d'un quelconque inventaire au sens strict du terme ! Vous devrez certes, comme dans tout jeu d'aventure, ramasser divers items pour ensuite les utiliser dans la résolution d'énigmes, mais vous ne pourrez user de vos acquisitions qu'en opérant un clic droit sur votre cible, puis en sélectionnant le verbe « utiliser » qui vous ouvrira alors la liste des items en votre possession.

Intuitif, bien que demandant un certain temps d'adaptation pour les habitués des jeux Lucas Arts, ce système s'enrichit en outre de quelques subtilités supplémentaires bienvenues. La première répond au doux mais étrange nom de Ratpouch. Doté d'un chara-design évoquant un bouffon, vous serez amené à sauver ce joyeux drille dès le début de l'aventure et devrez par la suite l'utiliser pour réaliser des actions hors de vos capacités, ce via la commande « Dis à ». Le bougre s'avérera très vite indispensable, et il sera même possible de lui assigner un enchaînement de plusieurs actions, toujours via la concaténation de différentes parties de phrases...du moins en théorie. Dans la pratique, les problèmes de collision mentionnés plus haut auront la plupart du temps pour effet d'interrompre la commande, et de vous obliger à « découper » vos consignes en plusieurs parties distinctes. Notons que ce principe sera repris dans Beneath a Steel Sky, le joueur étant alors accompagné d'un robot du nom de Joey lui-aussi utilisable pour résoudre certaines énigmes. La seconde subtilité réside dans la présence de combats, chose rare dans les point & click de l'époque. Lors de ces affrontements, le jeu passe dans un mode particulier avec trois curseurs disponibles : avancer, reculer et hache. Le dernier cité se sub-divise lui même en trois variantes permettant de placer des coups en position haute, normale, ou basse, ou bien de déclencher une parade répondant aux mêmes critères. Chacun de ces cinq curseurs différents s'affichera en fonction de sa position par rapport au personnage. Attention cependant, il est évident que ces séquences pourront aboutir à votre mort. Il sera par conséquent vivement conseillé d'opérer des sauvegardes régulières afin d'éviter de mauvaises surprises. Bien souvent à cette époque, les jeux tentant de varier leur gameplay en incluant des séquences originales étaient sanctionnés par une maniabilité hasardeuse. Pourtant, ces phases de combat s'avèrent parfaitement jouables et même plutôt agréables, permettant au jeu de se démarquer positivement de la concurrence.

Cette démarcation est tout aussi évidente dans les énigmes rencontrées, beaucoup moins loufoques qu'au sein d'un jeu Lucas. Tous les puzzles sont ici logiques, et l'habitué des point & click ne restera jamais bloqué bien longtemps sur une interrogation s'il prend soin de collecter les bons renseignements au travers de ses dialogues avec les PNJ. Par conséquent, l'aventure de LOTT s'avère relativement courte et seules quelques heures seront nécessaires pour en voir le bout, d'autant que les puzzles sont finalement assez peu nombreux et pas forcément passionnants. Une durée de vie assez faible donc, et un potentiel de rejouabilité tout aussi limité compte tenu de la linéarité du titre. En effet, si vous serez libre de choisir dans une certaine mesure l'ordre de vos actions, cela n'influera que très peu sur le déroulement des événements et ne vous poussera aucunement à recommencer une partie pour aborder l'aventure d'une autre manière...

Une ambiance admirablement retranscrite

Terminons ce test par un rapide point sur l'aspect technique du soft. Visuellement, LOTT se base sur une palette de seize couleurs offrant un rendu relativement terne et sombre. Les protagonistes sont dotés de sprites suffisamment grands pour être aisément reconnaissables, mais pâtissent d'une animation qui aurait mérité d'être plus fluide. Enfin, une grosse partie de l'aventure se déroule dans le village de Turval qui ne compte que quelques écrans différents. Vous aurez par conséquent le sentiment de visiter encore et encore les mêmes lieux, occasionnant de fait la naissance d'une certaine lassitude. Malgré ses faiblesses techniques, le titre n'en possède pas moins une forte identité visuelle parvenant avec brio à immerger le joueur dans cette atmosphère transpirant le médiéval fantastique. Un constat qui s'applique également à la bande son. Hormis la séquence introductive offrant des musiques évoluant au fil de l'action, le tout s'avère assez pauvre sur le plan auditif se contentant d'un thème d'ambiance apparaissant parcimonieusement, et de bruitages qui auraient gagné à être plus nombreux. Pourtant, jamais vous ne ressentirez l'envie de couper le son, et vous vous apercevrez rapidement que cette apparente pauvreté retranscrit une ambiance oppressante, soulignant le fait que de sombre desseins se jouent à Turnval. Notons enfin que LOTT n'a pas bénéficié d'un doublage, et dispense ses conversations sous la forme de fenêtres textuelles ayant parfois tendance à se superposer lorsque plusieurs échanges ont lieu simultanément dans la même pièce. Un défaut pas forcément gênant dans la pratique, mais qu'il me paraissait malgré tout important de souligner...

Conclusion

A son époque, Lure of the Temptress était un jeu extrêmement ambitieux se basant sur un moteur révolutionnaire qui sera d'ailleurs réutilisé dans la quasi-totalité des épisodes de la saga Broken Sword par la suite. Toutefois, en tant que premier titre à user du Virtual Theatre, on a le sentiment que le soft essuie quelque peu les plâtres en cumulant quelques défauts dont la répétition ne manquera pas de déclencher une intense frustration au cours de la partie. Pourtant, ces quelques fautes techniques ne doivent pas occulter les innombrables atouts de ce jeu qui vous immergera dans son ambiance médiéval-fantastique accrocheuse et basée sur un scénario distillé avec talent au fil des heures de jeu. Ce premier essai, dans l'ensemble réussi, est un concentré de bonnes idées prouvant la volonté des développeurs d'apporter quelque chose de nouveau au genre du point & click, et pas seulement de profiter d'un effet de mode en copiant les productions estampillées Lucas Arts.

Réalisation : 13/20
Gameplay : 12/20
Bande son : 11/20
Durée de vie : 12/20
Scénario : 16/20

VERDICT : 13/20


Article publié le 11/09/2014 Jeu testé par Manuwaza