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Reikai Doushi, un jeu novateur dans bien des domaines

Il y a des jeux qui sont si mauvais, que les japonais ont inventé un terme les désignant: Kusoge, contraction de Kuso et de game, signifiant littéralement "jeu de merde". Si je vous explique cela c'est que le titre présenté ici, un oublié de l'histoire en plus d'être un jeu d'arcade rare datant de 1988, ne doit pas être loin de cette catégorie. Pourtant, à bien des égards, il mérite toute votre attention!


La première des raisons qui le rend digne de votre intérêt est sa particularité graphique. Il s'agit, à ma connaissance, du premier jeu de combat avec digitalisation des décors et des personnages. Il s'agit en fait probablement du premier jeu utilisant la technique de la digitalisation, tout court, mais cela n'est pas certain.
Un jeu bien plus connu ayant utilisé cette technique reste Exterminator de Gottlieb mais celui-ci ne sera commercialisé qu'à partir de 1989, soit un an après le titre de Home Data que vous voyez ici. Je vous parlerai bientôt de ce soft donc restez à l'écoute.

Revenons-en à Reikai Doushi. En plus de se servir de la digitalisation, les développeurs de chez Home Data ont utilisé une autre technique assez incroyable en 1988: la Clay Animation, autrement dit "l'animation de pâte à modeler"! Vous devez savoir ce qu'est la Stop Motion, certains s'en sont servis pour réaliser quelques clips impressionnants, basés sur des jeux vidéo. Cette Stop Motion, ou animation image par image n'est pourtant pas récente puisque Ray Harryhausen, dont je vous ai déjà parlé dans un autre "Le Saviez-vous" dédié à "The Astyanax", s'était rendu particulièrement célèbre en l'utilisant. Les créateurs de Reikai Doushi ont donc créé des marionnettes en pâte à modeler et les ont animées et filmées, centimètre par centimètre, afin de les introduire dans leur titre.
L'idée était osée en 1988. La puissance des bornes d'arcade était encore loin de véritablement pouvoir gérer une définition vidéo suffisante pour retranscrire la qualité d'un tel travail. Si on relativise le rendu par rapport aux capacités techniques, je pense qu'on peut parler d'une certaine réussite. Attention cependant, les mouvements des personnages sont très raides, il manque des étapes d'animation et l'ensemble évoque forcément les créatures aperçues dans les films fantastico-mythologiques des années 40 à 60. Le tout a quand même du charme, surtout associé à la digitalisation des arrières plans.
Ceux-ci furent également filmés. En réalité c'est même plus compliqué que cela! Il s'agit de mélanges de peintures, de maquettes et même de sprites traditionnels (la grue). Les personnages se découpent admirablement bien des arrières plans. Ce jeu peut ainsi être également considéré comme un précurseur dans la 3D, même si elle n'est exploitée qu'à des fins esthétiques et de profondeur de champ.

Enfin, si Reikai Doushi peut se targuer d'innover, c'est aussi dans sa thématique. Nous incarnons un prêtre taôiste devant exorciser la Chine de plusieurs démons. Jusque là, rien de bien nouveau finalement mais c'est la suite qui est incroyable! Chaque démon est en fait une figure historique chinoise! Nous y retrouverons ainsi par exemple l'impératrice Yang Kwei-Fei. Celle-ci, aussi connue sous le nom de Yang Guifei, vécut au 8ème siècle pour finalement mourir en 756. Le jeu précise les dates de mort de chaque protagoniste, c'est le seul point historique qu'il aborde mais un peu de recherche permet de retrouver les autres personnages par les noms proposés. Certains sont restés intacts comme ceux de Chiang Kai-shek, Genghis Khan ou Shi Huangdi tandis que d'autres furent un peu modifiés. Je ne saurais vous dire pourquoi, peut être par simple esprit de rigolade ou par peur. Mao Zedong est ainsi également lisible sous la forme de "ke Sawanishi" en Japonais mais en chinois les idéogrammes se transcrivent Mao Zexi en lieu et place de Mao Zhuxi. N'étant pas spécialiste de la transcription des noms chinois en Japonais et inversement, je peux me tromper mais le reste des éléments étayent l'idée qu'il s'agit bien de Mao: la date de sa mort, fidèle à un an près, ses vêtements verts, reconnaissables entre mille et sa technique secrète, utilisant l'idée de formulaires (en rapport avec la bureaucratie de l'époque de Mao).
Je parlais de vêtements et ceux-ci sont véritablement une ode aux costumes de fantômes traditionnels chinois. Ceux qui auront déjà vu des films de la Shaw Brother ou d'autres studios de l'âge d'or du cinéma Hong-Kongais, sauront de quoi je parle!
En plus des personnages rencontrés, qui sont donc tous des Gyonshi (des vampires chinois, en fait des morts vivants cherchant à capturer l'essence vitale des vivants), le jeu nous fait parcourir les abords de la ville de Pékin jusqu'à la cité interdite. Nous franchirons ainsi la banlieue de Beijing, le village de Xuanwu, la forêt de Kunning, la plaine de Qianqing, la montagne de Zijincheng (la fameuse cité interdite), un passage le long de la falaise vers Zijincheng, la porte de la cité de Zijincheng et enfin la salle du trône de Qin Shi Huang, premier empereur de la chine unifiée.
Les environnements ne respectent pas du tout la géographie locale, ni celle d'il y a des siècles, ni celle des années 80. Ainsi, tout ce que nous voyons du jeu, n'est en fait situé qu'au pied d'une montagne dont notre héros devra gravir le chemin. Nous franchirons donc des villages bordés de pins et aménagés d'habitations traditionnelles, des forêts brumeuses ou des chemins escarpés.

Comme vous le voyez, les créateurs de Home data semblent avoir éprouvé un certain plaisir à utiliser le folklore, les images d'Epinal et l'histoire de la Chine pour produire un titre atypique. Voyons rapidement de quoi est fait ce jeu de combat niveau gameplay. Il s'agit d'un titre à la Street Fighter mais très rudimentaire, comme l'était la plupart des titres avant son avènement. Nous disposons de trois boutons, un pour les coups de pieds, un pour les coups de poings et un pour les sauts. Les coups sont exécutables debout, accroupi ou en l'air avec chaque fois une animation dédiée. Le but du jeu est de vaincre huit adversaires. Pour ce faire il faudra les toucher aux bons endroits, le jeu ne dispose pas de garde mais toutes les zones ne sont pas des touches chez tous les ennemis. L'écran de jeu est très réduit surtout du fait de la taille imposante des personnages. Il ne défile pas mais les adversaires peuvent sortir par une extrémité pour rentrer par une autre. Vider la barre de vie d'un adversaire ne suffit pas à le vaincre, il faut le toucher une ultime fois dans la tête pour le décapiter! Nous voyons chaque fois la tête de l'ennemi rouler à nos pieds! Barbarian, légende de l'Amstrad CPC, célèbre pour ses décapitations, n'a précédé Reikai Doushi que de peu puisque sorti en 1987. Le personnage dirigé doit être vaincu de même. Nous disposons de trois vies pour vaincre un opposant. La subtilité réside dans le fait que chaque nouvelle tentative parmi les trois accordées pour triompher, permet de poursuivre l'attaque sur un assaillant avec l'état dans lequel était sa barre de vie lors de notre défaite! Ceci n'est pas un luxe car le jeu est affreusement difficile! Les personnages sont incroyablement résistants à partir du troisième! Il faudra plusieurs coups pour ôter un seul élément de la barre de vie. Associée à la rigidité de la jouabilité (de par l'animation raide, le manque de coups dû à l'âge du titre, l'absence de garde et la nécessité d'appuyer sur un bouton pour sauter) et à l'époustouflante facilité avec laquelle les ennemis vous ôtent des portions titanesques de votre barre de vie, cette résistance est un calvaire pour le joueur. De temps à autre (et beaucoup plus fréquemment dans les combats intenses) une grue survole l'aire de jeu et largue un talisman. Celui-ci disparaissant à peine touché le sol, peut octroyer un regain d'énergie à qui le touche. Mais neuf fois sur dix il s'agira de l'éviter, voire de laisser l'autre le toucher, puisqu'il s'agira d'un malus, réduisant l'énergie à peau de chagrin. Enfin, chaque personnage adverse bénéficie d'un coup spécial avec parfois utilisation d'armes. Il doit s'agir là aussi d'un précurseur du genre, dans les deux domaines!

Bref, je disais d'entrée de jeu que Reikai Doushi ne devait pas être loin du Kusoge et ce sera certainement vrai pour quiconque voudra l'essayer aujourd'hui mais je pense qu'il faut relativiser et se rapporter à 1988 pour le juger. Sa technique, ses composants de gameplay et son background sont réellement impressionnants pour l'époque et font de lui un précurseur dans pas mal de domaines!


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Tanuki, le 26/10/2011