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Nostalgie et Retrogaming


Une vaste question


image d'illustration du dossier: Nostalgie et Retrogaming, Une vaste question

Un article de Tanuki

Ami rétrogamers l’heure est grave ! Criez, pleurez, laissez vous tomber mais surtout, souvenez vous, soyez nostalgiques et poussez avec moi le soupir de ceux qui regrettent car décidément, « c’était mieux avant » !

Rassurez vous, il ne s’agit pas de reprendre le refrain du « le jeu vidéo d’il y a dix ans était mieux », pas plus que celui de « la presse n’est plus ce qu’elle était » ! Non, tant qu’à faire dans la protestation, innovons et attaquons nous plutôt directement à la source de notre passion commune…la passion…ben oui, rien que ça !

Alors de quoi s’agit-il exactement ?

De ce qui nous fait perdre notre temps, en bien, perdu entre monde réel à la recherche du saint graal et monde virtuel à la recherche de la princesse perdue, de ce qui nous fait nous coucher à des heures peu raisonnables, nous lever des dimanches matin à cinq heure prêt à en découdre avec les monstres brocanteurs ou encore dépenser des fortunes et rappeler notre banquier en prétextant maintes excuses pour justifier nos découverts !

La passion donc, celle de notre culture, sous-culture comme disent dédaigneusement certains mais sous-culture riche d’émotions et de souvenirs. C’est de souvenirs et d’émotions justement que mes paroles s’inspirent quand je dis que c’était mieux avant. Oui mais en quoi était-ce mieux ? Où sont les preuves ? OBJECTION comme dirait l’autre en pointant du doigt !

On entend donc souvent que le jeu vidéo était mieux avant mais pour ma part je le trouve toujours aussi séduisant, pas plus, juste différent. C’est le plaisir qu’il me procure qui est différent et à bien y regarder je me trouve perdant dans l’évolution.

Je me souviens de ces moments qu’on dirait issus d’un vieux film en noir et blanc où bien calé j’explosais de l’alien pixélisé aux commandes d’un vaisseau qu’il fallait vraiment « conceptualiser » pour en faire l’objet de joutes sidérales. Son non ? PHOENIX ! Esquivant les rafales lentes à mourir de l’adversaire, je zigzaguais le long de mon unique ligne de déplacement à la recherche de l’angle précieux qui me permettrait de vaincre l’armada venue d’on ne sait où.

Rassasié jusqu’au dégoût des nombreuses heures passées sur mon clone de Space Invaders, je trouvais quelques semaines plus tard une nouvelle source de divagation dans la manipulation de mon kangourou personnel, pardon, Kangaroo personnel, le long de niveaux se ressemblant tous, greffés d’une musique terriblement addictive, que Suzana n’aurait pas renié, comprenne qui pourra.
Entonnant à chaque nouvelle partie de saute kangourou cet air que je n’oublierai jamais, je me prenais à ressentir ici de la frustration, la faute à une chute mortelle au fond d’un trou vicieux, là de la satisfaction, le mérite à un chronomètre qui finît par se laisser dominer. Décors noirâtres, « personnages » blanchâtres, le monde en deux couleurs, un plaisir sans demi-teinte. Et pourtant tout restait à imaginer. Comment regarder ce jeu maintenant et y voir des paysages ? Comment y reconnaitre un monde ? Il faut un œil aguerri, l’œil de ceux qui ont vu il y a longtemps, qui ont supporté et aimé. Aujourd’hui on vous le redit, il faut être beau, limite narcissique, complètement inutilement mais indispensablement il faut jeter de la poudre aux yeux. Et rien ne servira d’argumenter que la beauté est bien là ! Elle n’y est pas si elle n’est pas en haute-définition 500 000 polygones au mètre carré !

On dit parfois que les consoles nouvelle génération n’ont pas d’âme mais ne serait-ce pas celui qui le pense qui a perdu la sienne ?

Mario sauvait sa princesse en sautant pieds joints sur des tortues ailées pendant que Sonic parcourait à cent à l’heure sa verte contrée, accompagné d’un renard à deux queues et que Link nous berçait de sa mélodie à la flûte. Et connaissez-vous le point commun entre ces trois là ?
Hé bien, trois couleurs et cinq sons, j’exagère à peine, l’infini devant nos yeux. Un infini de rêve, d’aventure et d’imagination ! Ca y est le mot est lancé : imagination.

Je n’en démordrais pas, la passion se doit de stimuler l’imagination ! Et pas seulement visuellement.
Il faut pouvoir imaginer ce qui se trame derrière l’enlèvement d’une princesse, ce qui compose les murs d’un labyrinthe, il faut pouvoir sublimer une musique midi et en faire mentalement une symphonie accompagnant l’eternel combat entre le bien et le mal, il faut aussi pouvoir être jaloux de voir ce que d’autres joueurs possèdent, trépigner d’impatience quand dans un article d’une revue de mars vous voyez qu’un jeu culte à 10 000 kilomètres est prévue en sortie en septembre chez nous.
Les exemples sont nombreux où l’imagination revêt différents noms et joue un rôle dans la grandeur de l’émotion et par là même de la passion. Hors, de nos jours, que nous reste t’il, qu’est devenue notre imagination ?

N’importe quel jeu vous révèlera les tenants et les aboutissants des ambitions de l’ennemi, n’importe quel titre vous dira ce que vous devez savoir de la jeunesse du héros que vous incarnez… ah qu’il est loin le souvenir ému de voir bébé Mario et son Yoshi, au moins on ne sait toujours pas qui sont les parents…

Nos amis développeurs se sont sans doute trop laissé influencer par un public cinéphile en manque d’imagination pour croire qu’il fallait comme pour un film, tout montrer. Mais messieurs, le jeu vidéo n’est pas un film, on s’y implique, on a le temps, on peut lire entre les lignes et inventer nous même ce qui n’est pas montré !

Encore qu’accuser nos développeurs stars serait oublier que l’imagination nous appartient et qu’il nous appartient aussi de la cultiver. Ce n’est quand même pas la faute de Mr Kojima si à force de visionner les vidéos de présentation de son prochain titre sur Internet, si à force de lire des comptes rendus bourrés de screenshots dans les magazines et de précommander trois mois avant sa sortie officielle le titre, je connais ce titre presque mieux qu’en l’ayant déjà terminé ! Ah, je vous le dis, je veux retrouver cette sensation si désagréable mais si indispensable de l’attente insupportable. Je veux attendre la sortie de mon jeu et n’avoir sur lui pour toute information que les quelques clichés de mauvaise qualité que je pourrais glaner chaque début de moi dans ma revue fétiche. Tant que j’y suis je veux aussi être pauvre comme quand je n’avais droit qu’à un jeu à 50 euros par mois grand maximum. J’en ai assez de ce budget conséquent qui me permet d’assouvir mes envies chaque mois, chaque semaine, chaque jour ! Je veux devoir choisir mon jeu, le déballer lentement, les yeux grand ouverts, lire sa notice, l’insérer dans sa console et prier pour ne pas m’être trompé sur sa qualité au vue des peu d’infos, quelques tests mal rédigés et subjectifs tout au plus, qui m’auront servi de référence, parce que là vraiment c’en est trop ! Marre de savoir que je ne peux pas m’être trompé, que pour un jeu qui se termine, cent-cinquante autres m’attendent. Et après on se plaint de la facilité moderne de nos joujoux virtuels mais imaginez (là vous y avez doit !) si tout était resté pareil…
Bon, évidemment je ne suis pas dupe ! Je sais bien qu’il suffirait de me déconnecter de la toile, de ne plus acheter qu’une revue, de ne plus me procurer qu’un jeu par période pour retrouver mon amie imagination, celle qu’on m’a kidnappée ! Mais sincèrement, pas moyen d’y arriver. La passion a cela d’extraordinaire qu’elle mute, s’accorde aux tendances et vous laisse croire que vous en êtes le créateur/ possesseur. Plus moyen donc de savoir qu’une myriade d’images, de titres, de vidéos vous attend à une portée de clic, sans y toucher. Plus moyen de choisir, tout est tellement intéressant, comment prendre un jeu et pas un autre ?

Je vous le redemande, amis rétrogamers, pleurez avec moi ce temps qui ne reviendra pas, lancez donc une fleur à notre défunte compagne imagination et faite en avec moi le deuil.
Votre chagrin passé, accommodez vous des nouvelles vagues et finalement voyez le plaisir nouveau que vous offrent jeux en réseau et manettes hi-tech. De temps en temps, au détour d’un clic de souris ou au carrefour des étals bien fournis de votre revendeur de jeux vidéo, ayez une pensée pour ce que vous avez perdu car si c’est super maintenant c’était quand même mieux avant… quoique… rendez-vous dans quinze ans pour un nouveau regard en arrière plein de nostalgie défaitiste…


Article publié le 30/05/2008