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Les Femmes et le Jeu Vidéo


Une relation compliquée


image d'illustration du dossier: Les femmes et le jeu video, Une relation compliquée

Un article de Hayu

La femme et le jeu vidéo sont loin de vivre une aventure idyllique. Force est de reconnaître que ce média qui nous passionne tant ne fait pas vraiment dans la dentelle avec le beau sexe. Comment celui-ci pourrait-il prendre une place importante alors qu'il est, encore aujourd'hui, considéré comme un objet sexuel dans notre loisir préféré ?

Héroïnes...

Ce n'est pas Ivy de Soul Calibur qui viendra me contredire : en tant qu'homme, je m'aperçois que depuis tout petit, on me montre des paires de fesses et de seins ! Rares furent les occasions où un personnage féminin de jeu vidéo endossait un rôle autre que d'éveiller en moi...euh passons. Pourtant, il apparaît pertinent de rappeler que, très tôt dans l'Histoire du jeu vidéo, apparurent des femmes qui n'avaient pas pour unique but d'exposer leurs atouts naturels, et qui n'avaient en outre rien à envier à leurs alter-egos masculins. Dès 1981, Mrs Pac-Man fut créditée de son propre jeu dans les salles d'arcade. Même s'il ne s'agit pas d'une femme à proprement parler, elle n'en reste pas moins un protagoniste de sexe féminin se distinguant par un chara-design n'ayant pas pour vocation à provoquer des réactions malsaines chez les hommes. Par la suite, d'autres héroïnes firent leur apparition, mais la première à avoir été réellement travaillée n'est autre qu'Alis Landeel, apparue en 1987 dans Phantasy Star sur Master System. Génération 8 bits oblige, nous étions loin du photoréalisme et le background du soft s'avérait assez minimaliste. Mais elle était pourtant le personnage central de ce RPG. Loin d'être un objet sexuel, pas plus qu'elle n'était une faible femme, elle avait pour but ultime de venger la mort de son frère. Une caractéristique la plaçant sur un plan d'égalité avec les hommes...

Pourtant, un an auparavant, le joueur persévérant avait déjà pu découvrir Samus Aran dans Metroid, sorti sur Famicom en 1986. Le cas de figure était toutefois quelque peu différent, puisqu'il fallait terminer l'aventure dans son intégralité afin d'apprendre que l'on avait vécu cette dernière dans la peau d'une femme. Malin de la part d'Intelligent Systems, n'est ce pas ? Toujours est-il qu'Alis et Samus furent les premières femmes fortes que le jeu vidéo ait connu, préfigurant dès le milieu des années 80 le rôle pionnier qu'allaient endosser Sega et Nintendo. Passons rapidement sur Peach, Pauline, Daisy ou toutes ces femmes qui ne représentaient finalement qu'un prétexte à l'action dans les productions concernées, offrant le beau rôle à un mâle chargé de les délivrer de leurs kidnappeurs. Ces personnages féminins endossaient alors une personnalité fragile et faible, probablement afin d'accentuer le contraste avec leurs sauveurs.

Pour rencontrer une nouvelle femme ayant du caractère, une femme n'ayant pas froid aux yeux, sautons directement à l'année 1991, et à la commercialisation d'un jeu de baston précurseur baptisé Street Fighter II : The World Warrior. Si vous pensiez que Lara Croft avait, pour la première fois, permis au jeu vidéo « grand public » de découvrir une femme émancipée et forte, n'oubliez pas que la belle Chun-Li figurait au casting du fighting game culte de la firme d'Osaka. « Joli Printemps », puisque telle est la signification de son patronyme dans la langue chinoise, devint célèbre en intégrant le panel de personnages jouables d'un jeu de combat, milieu d'ordinaire exclusivement masculin. Les conséquences ne se firent pas attendre longtemps, et le public féminin apprécia grandement d'enfin pouvoir s'identifier à une héroïne dans un titre du genre. Dotée certes de belles cuisses, la jeune femme n'en était pas pour autant vulgaire. En Chine, l'arrivée de Street Fighter II coïncida plus ou moins avec l'émancipation de la femme, et nombre d'entre-elles s'approprièrent donc le personnage, l’idolâtrant. Nous pouvons donc affirmer que Chun-Li fut le premier personnage féminin marquant de l'Histoire du jeu vidéo, et sa cote de popularité reste assez incroyable de nos jours, tant au sein du public féminin que masculin...

Changement de registre avec Lara Croft, qu'il paraissait impensable d'omettre au sein de cet article tant elle fait office de cas d'école. Cette plantureuse jeune femme réussit en effet à concilier sa nature d'objet sexuel avec son opulente poitrine polygonée, et sa condition de femme forte et courageuse mise en évidence dès ses premières aventures trépidantes sur Playstation et PC. Quoi qu'on en dise, la console 32 bits de Sony a contribué dans le milieu des années 90 à démocratiser le jeu vidéo et c'est sans surprise qu'à cette occasion, de nombreuses femmes s'initièrent à ce nouveau loisir. Bien avant cela, des titres comme Tetris ou Columns avaient acquis une grande popularité, mais c'est bel et bien le rouleau compresseur nommé Playstation qui standardisa le média, et le succès de Lara Croft ne fut pas étranger au phénomène. Quel adolescent boutonneux, à commencer par moi, n'a pas été charmé par la belle aventurière ? Mais sa grande force fut de s'imposer comme un personnage attachant pour les joueuses, en combinant charme et force dans un type de jeu qui remportait un joli succès à l'époque. Visible même dans des publicités télévisuelles n'ayant rien à voir avec le jeu vidéo (qui ne se souvient pas de la série de spots destinés à promouvoir la Seat Ibiza?), Lara accéda rapidement au rang de véritable icône médiatique en sortant du virtuel pour se retrouver propulsée dans le réel, tant et si bien qu'elle fut même incarnée par de véritables femmes dans des shootings photo promotionnels. Chun-Li avait beau jouir d'une grosse cote de popularité, elle n'atteignit jamais un succès aussi retentissant que celui de Lara. Les jeux les mettant en scène étaient différents, et « Joli Printemps » n'eut pas l'occasion de figurer dans un Street Fighter en tant que personnage principal. Paradoxalement, Miss Croft connut au fil des ans une véritable descente aux enfers, tandis que la jeune chinoise resta constamment aimée par son public...

Au fil de cet article, je n'ai abordé que brièvement le cas du RPG au travers de l'exemple Phantasy Star. Pourtant, bon nombre d'héroïnes élurent domicile dans ce genre purement nippon dans les années 90, parmi lesquelles Terra de Final Fantasy VI, Lightning de FFXIII, ou encore Tara et Katia des Royaumes Perdus. Parler de parité serait excessif, mais nous retrouvons pourtant bon nombre d'héroïnes tout au long de l'Histoire du jeu vidéo. Prenez l'exemple du survival horror. Les premiers exemples vous venant à l'esprit seront probablement Jill Valentine et Claire Redfield apparues dans la saga Resident Evil, mais d'autres femmes moins connues ont également su tirer leur épingle du jeu, parmi lesquelles nous pourrions citer Aya Brea de Parasite Eve, ou les jumelles de Project Zero. Dès 1995, Clock Tower sur Super Famicom mettait le joueur dans la peau d'une adolescente devant s'échapper d'un orphelinat, tout en évitant l'affreux Scissorman. Certes, la jeune Jennifer était présentée en position de faiblesse, mais elle n'en était pas moins le personnage central du titre de Human Entertainment.

Depuis cette époque, le jeu vidéo est devenu plus moderne. Lara s'est refait une santé, et la femme possède de nos jours des rôles moins ingrats que dans les débuts de l'Histoire vidéoludique. Aujourd'hui, notre média de prédilection offre une mise en scène plus poussée (voire même parfois trop poussée, mais là n'est pas le sujet de cet article), avec des scénarios toujours plus travaillés et une grande importance laissée à l'identification du joueur (ou de la joueuse) à son avatar virtuel. C'est dans cette optique qu'apparut la possibilité de créer son propre personnage, comme c'est le cas dans les MMORPG, en choisissant notamment son apparence physique avant de partir à l'aventure. De plus en plus de titres permettent désormais de choisir le sexe du protagoniste à l'image de Mass Effect, nous prouvant bien que l'égalité des sexes est désormais de mise. Dans un autre registre, nous pourrions également citer The Last of Us, sorte de road trip catastrophe sur Playstation 3 au sein duquel Elly, une adolescente, endosse le rôle principal aux côtés du vieux Joel. Loin de n'être qu'une simple victime comme dans les jeux vidéos « traditionnels », nous sommes face à une jeune femme dotée d'un caractère de battante, la rendant terriblement attachante. Nous sommes donc bien loin de la notion d'objet sexuel ou de boulet agaçant le joueur. Tout n'est cependant pas rose, et de gros progrès restent à faire dans le rôle de la femme, tant au sein du jeu vidéo que dans la vie réelle...


...et joueuses

Assez parlé d'héroïnes. Pour la seconde partie de cet article, attaquons nous aux joueuses ! Car oui, celles-ci sont de nos jours beaucoup plus nombreuses que nous pourrions le croire, comme en témoigne une étude récente réalisée par le SELL (Syndicat des Éditeurs et Logiciels de Loisirs) qui nous apprend qu'un joueur français sur deux était une femme en 2013. Il serait idiot de croire que les joueuses se sont réveillées un beau matin pour, sous l'influence d'une puissance supérieure, se jeter sur la première console venue. Certaines d'entre-elles jouent depuis autant de temps que nous, et ont suivi l'évolution du jeu vidéo. Pour reprendre l'exemple de Chun-Li mentionné plus haut, sachez que ce n'est pas pour rien que de nombreuses femmes en firent leur icône vidéoludique. De même, et quoi qu'on en dise, des titres comme les Sims ont permis de faire découvrir le jeu vidéo à des joueuses qui, par la suite, ont étendu leur expérience à d'autres genres. Citer les Sims est cependant quelque peu réducteur, puisque ce constat s'applique tout autant aux jeux Facebook, à la Wii, ou à la 3DS avec des softs comme Animal Crossing, Pokémon ou Todomachi Life en faisant des plates-formes particulièrement prisées par le public féminin. Cantonner la femme aux jeux susnommés serait toutefois maladroit, car tout type de jeu intéressant un homme peut potentiellement attirer l'attention d'une femme. A titre d'exemple, nombre d'entre-elles font montre d'une extraordinaire maîtrise sur des jeux comme Call of Duty, Halo, mais aussi Soul Calibur ou Street Fighter IV. Il y a fort à parier, messieurs, qu'aucun d'entre-vous ne soit capable de vaincre une Kayane en combat singulier dans un jeu de baston...

Si vous ne me croyez pas, un petit tour sur Twitch (célèbre site de streaming spécialisé dans le jeu vidéo), devrait achever de vous convaincre. On trouve d'ailleurs de plus en plus de joueuses professionnelles, et je ne vois aucune raison pour que la tendance s'inverse. Nul besoin de posséder une force physique herculéenne pour tenir une manette ou un combo clavier/souris, et c'est donc tout logiquement que la femme se place sur un pied d'égalité avec l'homme dans le domaine du jeu vidéo. Des titres comme Hearthstone, célèbre jeu de cartes de Blizzard, constituent une preuve flagrante. Pourtant, l'homme fait toujours preuve d'un machisme sans égal, un triste constat visible fréquemment dans l'actualité vidéoludique. A titre d'exemple, l'IESF (fédération mondiale de l'E-Sport) a prévu un championnat du monde en novembre, compétition ayant pour particularité d'être...interdite aux femmes, notamment sur Hearthstone. Il faut savoir que l'E-Sport féminin reste, même de nos jours, un sujet sensible. Les femmes demeurent bien trop rares, ce qui conduit souvent à l'organisation de tournois spécifiques. Bref, le monde du jeu vidéo comprend toujours de gros soucis de mixité. L'IESF, quant à lui, n'a pas invoqué de raisons claires pour motiver sa décision, se contentant d'affirmer que certains jeux se doivent d'être exclusivement joués par des hommes. Quelle tristesse d'entendre de telles sottises en 2014, n'est-ce pas ? Les gros organismes gérant l'E-Sport ne représentent pas les seuls cas de misogynie. En effet, les services online comme le X-Box Live et le Playstation Network comptent de nombreux cas de harcèlement, de machisme aigu, et de mauvaise foi.

En un mot comme en cent, le chantier est colossal pour mettre en place une véritable parité dans le monde très masculin du jeu vidéo. Toutefois, il est évident que les choses ont plutôt tendance à évoluer dans le bon sens. Sur un plan plus personnel, je tenais réellement à rédiger ce dossier car, comme de nombreux joueurs, il m'est arrivé d'être assez macho envers les joueuses, chose que je regrette réellement. J'espère donc que cet article vous aura sensibilisé au monde féminin, et que vous serez fair-play lors de votre prochain affrontement vidéoludique contre une demoiselle.

Article publié le 25/07/2014

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